Retour à 1968-1

Publié le par Olivier Lussac

    "Il est des moments, dans l'histoire des hommes, où la faculté critique de l'esprit, par un surcroît d'activité et de virulence, apparaît comme prédominante. Plus que cela encore, elle semble absorber ou résumer les autres facultés, devenir l'esprit même. Nous assistons à l'un de ces moments. Non point parce que l'esprit aurait, arbitrairement et par fantaisie, décidé de se montrer sous ce jour essentiellement et intégralement critique. Mais parce que l'objet de son exercice, c'est-à-dire le monde, a pris la forme d'une société de production et de consommation.
    Cette mutation, telle que l'ont étudiée et décrite divers sociologues, parmi lesquelles on s'accorde assez généralement à citer Herbert Marcuse comme le plus pénétrant, a fait du monde un monde clos, en dehors duquel rien n'existe, et, au sens le plus exact du terme, totalitaire. Sa finalité se trouve en lui-même. Il produit pour consommer ce qu'il produit. Toutes les activités de l'esprit, à l'intérieur de ce monde, seront purement techniques ; elles ne tendront qu'à assurer, développer et perfectionner la production et à administrer la consommation des objets produits. Mais l'esprit, qui est de nature volatile, ne saurait se borner à ses besognes strictement pratiques ; il aspire à se dégager d'une si plate et monotone astreinte, pour se situer en dehors du monde et juger celui-ci. C'est donc par un acte de violence qu'il exercera celle-là de ses propres fonctions : sa fonction critique. Il ne s'agit pas pour lui d'examiner la façon dont, à l'intérieur de la machine totalitaire, tourne tel ou tel de ses rouages et d'y apporter des améliorations, également d'ordre technique et pratique. C'st tout l'ensemble de la machine qu'il considère. Et la violence avec laquelle il s'est arraché à la machine afin de la juger se communiquera à son jugement. Celui-ci sera, lui aussi total et absolu. Il sera une contestation de toute la machine, une condamnation de son existence." Jean Cassou (extrait)

Jean Cassou, Art et contestation
Michel Ragon, L'artiste et la société
André Fermigier, "Plus jamais Claudel"
Gilbert Lascault, L'Art contemporain et la "vieille taupe"
Gerald Gassiot-Talabot, La Contestation est-elle possible ?
Raymonde Moulin, Vivre sans vendre
Pierre Gaudibert, Champ culturel et formation artistique
René Micha, "Le Cinéma s'insurge"
René Micha, "Le Cinéma c'est la liberté"
Alain Jouffroy, Que faire de l'art ?

© Art et Contestation, Bruxelles, La Connaissance S. A., Témoins et témoignages/Actualités, 1968.


Publié dans Ouvrages. CDs & DVDs

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article