Acconci Vito

Publié le par Olivier Lussac

Après des études de littérature à Holly Cross College, Worcester, Massachusetts (B.A. en 1962), puis de littérature et de poésie à l'université de Iowa (M.F.A en 1964), il enseigne la théorie de l'art dans des écoles d'art visuel à New York, écrit de courts romans et des nouvelles qu'il publie dans des magazines (Olympia Magazine, Paris) avant de se consacrer totalement à la poésie. Il est fondateur et co-éditeur de la revue 0 to 9. Il s'intéresse aux recherches esthétiques du minimalisme, en particulier aux propriétés matérielles des signes, aux structures abstraites et à l'environnement. Il utilise les mots comme des objets plutôt que comme des signifiants et la page comme un champ d'action : "I can consider my use of the page as a model space, a performance area in miniature or abstract form." 1 A partir de 1969, la page devient trop petite pour lui, ne référant plus qu'à elle-même.
Le contexte de l'art conceptuel et le réseau de galeries permettent à Vito Acconci de passer de la poésie aux arts visuels. Ses préoccupations s'orientent désormais vers "l'espace réel (par exemple, l'espace physique, l'espace social, l'espace culturel, le quotidien, le temps), qu'il explore à travers différents médias.
- La photographie : dans Toe-Touch (1969), par exemple, il évalue les limites de son environnement par rapport à celles de son corps.
- Le son : avec Slap (1969), il explore l'espace sonore, par la propagation des ondes et leur retour sur son corps.
- Des actions et des performances : dans les Following Pieces (1969), il expérimente l'espace public en suivant des personnes dans la rue et étudie le processus même de les suivre. Dans Rubbing Piece (1970), il se crée une blessure, et s’intéresse autant à la durée de l'action proprement dite qu’à celle de l'après-performance. Avec Seed Bed (1971), il détermine un espace de contact, où le spectateur fait agir l'artiste, lequel répond au spectateur.
- Des films Super 8 et des vidéos : de 1969 à 1971, dans ses Body Works (citons Opening, 1969, Correction, 1970, Water Ways, 1971), il focalise la caméra sur l'espace de son corps, souvent sans tête, celui-ci devenant l'unique champ d'exploration et d'action 2.
Il nomme Actions Activities ces performances conçues pour des médias spécifiques. De même que les mots entraient en lutte avec la page, le corps s'éloigne de la caméra pour lutter avec les limites du cadre (l’écran). Si le Super 8 permet à Acconci des références implicites à un monde privé et essentiellement physique, la vidéo, avec l'introduction du son, offre de nouveaux domaines à explorer à connotation psychologique, politique, sociologique…
En 1973-74, avec My Word, son dernier film Super 8, et en 1976, avec The Red Tapes, sa dernière vidéo 3, Acconci propose un commentaire sur son travail antérieur, un constat sur son introspection et sur tous les espaces explorés précédemment. Il souligne les limites - devenues insupportables pour lui - du lieu qui l'accueille comme celles du bord de l'écran. La "page" est devenue à nouveau trop petite. Il abandonne définitivement la vidéo pour l’"espace réel" et choisit - comme Dan Graham ou Richard Serra à la même époque - les espaces publics. Il réalise essentiellement des sculptures "au sens élargi" 4, des installations et des environnements. Le langage continue d'y jouer un rôle, mais plus discret. Ses environnements prennent en compte la participation du public. Acconci oriente désormais sa réflexion sur l'architecture domestique (Instant-House, 1980) et sur l'aménagement de l'espace urbain. Ses projets (parcs, aires de jeux…) relèvent d'une conception politique de l'art, selon laquelle l'espace public devrait "fonctionner comme un forum, être un lieu de débats et de discussions" 5.
Catherine Ouy

1 "Je peux considérer mon utilisation de la page comme un espace type, un lieu miniature de performance ou une forme abstraite." (Avalanche, New York, numéro 6, automne 1972)
2 Mario Diacono, "Du texte-action au corps comme texte", Vito Acconci, New York, Out of London Press, 1975.
3 Hormis une œuvre de commande, Election Tape, réalisée en 1984 en réponse à la campagne de réélection de Ronald Reagan.
4 Rosalind Krauss, "Sculpture in Expanded Field", The Originality of the Avant-Garde and Other Modernist Myth, Cambridge, Mass., Londres, The MIT Press, 1985, p. 277-290.
5 Vito Acconci, catalogue de la 3e Biennale d'art contemporain de Lyon, 1995, p. 126.

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