3. Aktion @ Rudolf Schwarzkogler. 1965
- SCHWARZKOGLER Rudolf, 3. Aktion, 1965 (actionnisme).
— « Les photographies de Schwarzkogler, qu’il nommait ‘‘Actions’’, furent réalisées en 1965 et 1966. Les images montrent un corps dénudé, aveuglé, couvert de bandages ou immobilisé, et qui semble être en train de subir les affres de tortures ou de manipulations chirurgicales rudimentaires. Action 3 (1965), en particulier, soumet le modèle, Heinz Cibulka, à différentes poses sans jamais dévoiler entièrement son visage. Sur l’un des clichés, Cibulka est ‘‘nu, assis sur une boule blanche, les jambes écartées. Autour de son pénis est glissée une tête de poisson dont la bouche est tenue ouverte par une lame de rasoir. Un pansement carré est collé au-dessus de son pénis. Sous la tête de poisson, un sombre filet de liquide est visible sur la boule blanche.’’ (Rudolf Schwarzkogler, in M. Green (dir.), Brus, Muhl, Nitsch, Schwarzkogler: Writings of the Vienna Actionists, Londres, Atlas, 1999, p. 191) Une autre photographie reprend la même posture, le pénis cette fois entièrement emmailloté dans un bandage d’où s’écoule ce qui semble être une traînée de sang. Ailleurs, le modèle, dont la tête est hors cadre, se tient debout, nu, et son pénis entouré d’un bandage blanc repose sur une plaque noire, à proximité de lames de rasoir. D’une image à l’autre, le bandage et les coulures de liquide sombre apparaissent comme les traces d’un acte que tout pousse à imaginer et que rien ne permet d’attester. Le pénis devient le centre de la narration tout en restant invisible. L’absence du pénis de la surface des photographies sert la métaphore de la mutilation à travers le pouvoir d’évocation de ce qui n’est pas visible. Cette évocation, qui tire son ressort dramatique de ce qui laisse imaginer, est susceptible de provoquer chez le spectateur une réaction plus viscérale que raisonnée. »
(Pierre Saurisse, « La performance des années 60 et ses mythes », in Janig Bégoc, Nathalie Boulouch & Elvan Zabunyan, La Performance. Entre archives et pratiques contemporaines, Rennes, Presses universitaires de Rennes & Archives de la critique d’art, 2010, p. 37)